En lisant les commentaires sur la résolution 2334 (La Résolution 2334) , on peut avoir l'impression que c'est un grand pas en avant pour la solution des deux États, mais c'est un peu plus compliqué que cela.
La situation juridique du territoire de la Palestine avait déjà été définie clairement en 1980 dans la Résolution 465. Le Conseil de sécurité: «Considère que toutes les mesures prises par Israël pour modifier le caractère physique, la structure institutionnelle ou le statut des territoires palestiniens et des autres territoires arabes occupés depuis 1967, y compris Jérusalem, ou de toute partie de ceux-ci n'ont aucune validité en droit et que la politique et les pratiques d'Israël consistant à installer des éléments de sa population et de nouveaux immigrants dans ces territoires constituent une violation flagrante de la Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre et font en outre gravement obstacle à l'instauration d'une paix d'ensemble, juste et durable au Moyen-Orient» (§ 5).
Ce texte avait été adopté à l'unanimité des quinze membres du Conseil. Même les États-Unis l'avaient accepté. C'était sous la présidence de Jimmy Carter.
«Aucune validité en droit», «violation flagrante», les critiques n'ont guère changé entre 1980 et 2016. Par contre, la prise de position s'est beaucoup raffermie. Le Conseil ne «considère» plus que ça ne va pas, il «exige» dorénavant l'arrêt de la colonisation (bien que la version anglaise ait moins de mordant avec les mots «reiterates its demand»).
On est donc clairement passé d'un niveau 1 à un niveau 2, mais il ne se passera très probablement pas grand chose de plus parce qu'il faudrait atteindre le niveau 3: il manque le mot «sinon». Le Conseil enjoint Israël à stopper la colonisation, et sinon quoi ? Que se passera-t-il si Israël fait la sourde oreille ? Rien. Aucune sanction n'est prévue.
Toutefois, le mot «exige» est fort. Si l'on estime qu'il l'est suffisamment, on a affaire à une décision, c'est-à-dire à une résolution contraignante. C'est susceptible d'avoir une grande importance devant un tribunal international, par exemple la Cour Internationale de Justice (litiges entre les États d'Israël et de Palestine) ou la Cour pénale internationale (procédures contre des personnes physiques accusées de crimes de guerre ou de crimes contre l'humanité).
N.B.: les Israéliens affirment souvent que les résolutions ne sont contraignantes que si elles ont été adoptées sous le chapitre 7 de la Charte des Nations Unies (1), mais cette vision des choses est erronée. L'article 25 de la Charte est clair : «Les Membres de l'Organisation conviennent d'accepter et d'appliquer les décisions du Conseil de sécurité conformément à la présente Charte». Que ces décisions concernent l'un ou l'autre chapitre de la Charte n'a aucune importance. Elles doivent toutes être respectées.
(1) Exemple: Barak Ravid, «Analysis: Understanding the UN resolution on Israeli Settlements: What Are the Immediate Ramifications?», Haaretz, 24/12/2016.