Le 15 août 2019, le gouvernement israélien a annoncé qu’il refusait l’entrée en Israël et en Palestine à deux membres du Congrès des États-Unis, Ilhan Omar et Rashida Tlaib. Elles font toutes deux partie du parti démocrate.
Cette décision a suivi une sollicitation faite par le président Trump dans un tweet du même jour. Il y disait qu’Israël montrerait «une grande faiblesse» si les deux parlementaires étaient autorisées à entrer dans le pays. Ce tweet est inouï: on y voit des dirigeants étrangers invités par le chef de l’exécutif des États-Unis à prendre des mesures contre des membres du pouvoir législatif de son propre pays.
Le14 juillet, Donald Trump avait déjà pris Ilhan Omar, Rashida Tlaib, Alexandria Ocasio-Cortez et Ayanne Pressley pour cibles dans un tweet où il écrit qu’elles feraient mieux de retourner aux endroits «totalement en ruine» et «infestés par les criminels» d’où elles viennent. Les habitants des endroits concernés apprécieront.
Il est intéressant de relever que Binyamin Netanyahu a osé agir comme il l'a fait malgré le risque de dégrader ses relations avec le parti démocrate, qui s'est évidemment rangé aux côtés de ses représentantes. Le premier ministre israélien considère apparemment qu’il peut dédaigner ce risque, ce qui pourrait s'expliquer par la solidité de l’emprise des Israéliens sur les dirigeants américains. On a déjà vu cela en 1967 quand la marine israélienne a attaqué l’USS Liberty, tuant 35 marins des États-Unis sans provoquer de réaction du président Lyndon Johnson, pas même une mesure purement symbolique comme le rappel de son ambassadeur en Israël (1).
Pour Ilhan Omar, «refuser la visite de deux membres légitimement élues du Congrès n’est pas compatible avec la qualité d’allié», et elle ajoute que «refuser à des millions de personnes la liberté de mouvement ou d’expression ou l’autodétermination n’est pas compatible avec le titre de démocratie» (2).
Bernie Sanders, qui est candidat à la présidence des États-Unis, a dit à MSNBC que, si les Israéliens ne veulent pas recevoir des membres du Congrès, alors ils pourraient peut-être décliner l’offre des milliards de dollars qu’ils reçoivent des États-Unis (3).
À noter que l’attitude du gouvernement israélien envers les personnes dont les opinions politiques ne lui conviennent pas n’est pas nouvelle. En 2010, Noam Chomsky s’était fait refouler à la frontière parce qu’il critiquait l’occupation militaire de la Palestine, ce qui avait conduit l’Association israélienne pour les droits civils à dire que ce genre de choses est «caractéristique d’un régime totalitaire» (4).
(1) J. Crewdson, «New revelations in attack on American spy ship», The Chicago Tribune, 2/10/2007.
(2) C. Montoya-Galvez, «Rashida Tlaib and Ilhan Omar denounce Israel’s travel restrictions during press conference», CBS News, 19/8/2019.
(3) B. Sales, «Bernie Sanders: Israel shouldn’t take US aid if it stands by ban of Omar, Tlaib», The Times of Israel, 16/8/2019.
(4) A. Hass, «Noam Chomsky Denied Entry Into Israel and West Bank», Haaretz, 16/5/2010.