À chaque fois qu'un parlement national demande à son gouvernement de reconnaître la Palestine ou qu'un État agit en ce sens, les États-Unis répètent que l'accord préalable d'Israël est nécessaire: selon eux, il faut passer «par des négociations directes entre les parties qui règlent les questions liées au statut final» (1).
Cette position soulève plusieurs interrogations. D'abord, l'idée qu'un «statut final» doit être discuté semble sous-entendre que la Palestine n'existe pas encore en tant qu'État alors qu'elle a le statut d'État observateur aux Nations Unies et qu'elle a adhéré à divers traités internationaux dont la signature est réservée aux États (pour des exemples, voir Attaque par Israël de la résidence de l'agent consulaire de France à Gaza). Du point de vue du droit international, le statut d'État de la Palestine est donc difficile à contester.
Les États-Unis n'expliquent pas non plus de quel droit un État (quel qu'il soit) aurait un droit de veto sur l'existence d'un autre État (quel qu'il soit). On ne voit pas d'où sort cette idée, et elle paraît peu compatible avec le principe de l'égalité de droits des peuples affirmé par la Charte des Nations Unies (art. 1.2).
Une autre idée américaine qui pose problème est celle qu'il y a quelque chose à négocier. Or ni les États-Unis, ni Israël n'ont à discuter le statut final de la Palestine puisque que ce statut est défini par le droit international: c'est une Palestine souveraine, conformément à l'article 1 commun du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels: «Tous les peuples ont le droit de disposer d'eux-mêmes».
Le pacte sur les droits civils et politiques a été ratifié par Israël le 3 octobre 1991 et les États-Unis ont fait de même le 8 juin 1992. Israël a donc l'obligation de se retirer de la Palestine.
En conformité avec la Charte des Nations Unies (art. 1.2), l'État israélien serait même censé aider les Palestiniens à obtenir l'autodétermination.
Soit dit entre parenthèses, les efforts des États-Unis pour subordonner la solution des deux États à l'accord d'Israël sont sans grandes conséquences sur le fond: ce sont les peuples, et non les États, qui ont le droit de disposer d'eux-mêmes. Que les négociations aient lieu ou non, qu'elles se passent bien ou non, qu'elles aboutissent ou non, c'est égal: dans tous les cas de figure, le peuple palestinien a droit à son propre État.
(1) «French vote urges recognition of Palestinian state», Associated Press, 2 décembre 2014.