Le transfert de l'ambassade des États-Unis à Jérusalem est illégal

Le 14 mai 2018, les États-Unis ont officiellement reconnu Jérusalem comme la capitale d'Israël et ont fêté l'inauguration de leur nouvelle ambassade dans cette ville (voir L'ambassade des États-Unis à Jérusalem ?). La majorité des chaînes de télévision et des journaux occidentaux ont commenté ces deux événements en disant que les Palestiniens y voyaient une «provocation». 

Mais cette façon de présenter les choses est trompeuse: si une agence postale fait l'objet d'un vol, on ne dit pas que la Poste y voit une provocation, on dit que c'est un acte illégal. C'est la même chose pour le déménagement de l'ambassade américaine: il s'agit d'un acte illégal, pas d'une provocation. En 1980, dans sa Résolution 478, votée par quatorze voix contre zéro, le Conseil de sécurité a été clair: il a demandé aux «États qui ont établi des missions diplomatiques à Jérusalem de retirer ces missions de la Ville sainte».

La France est l'un des rares pays occidentaux à avoir expliqué correctement ce qui se passait: le jour même de l'inauguration, Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des Affaires étrangères, a publié une déclaration dans laquelle il rappelle que le transfert de l'ambassade américaine à Jérusalem «contrevient au droit international et en particulier aux résolutions du Conseil de sécurité et de l'Assemblée générale des Nations unies».

La fête d'inauguration a été organisée 70 ans jour pour jour après la proclamation de l'État israélien par David Ben-Gourion. Si Trump avait pour intention d'offenser deux fois les Palestiniens, une fois avec le transfert de l'ambassade et une fois avec le choix de la date, et ainsi de bloquer un peu plus les chances de la paix, alors son but est atteint.

La cérémonie a eu lieu en présence d'Ivanka Trump et Jared Kushner, la fille et le beau-fils du président Trump. Sachant que Trump a confié à Kushner la mission d'agir en tant qu'intermédiaire dans le conflit israélo-palestinien, sa présence aux côtés des Israéliens revient à se moquer des Palestiniens. Quand un négociateur est chargé d'aider à résoudre un conflit entre une personne A et une personne B, il ne se rend pas à la fête d'anniversaire de A, et, s'il le fait, il ne doit pas s'étonner si B n'a plus confiance en lui.

En même temps, les tirs israéliens contre des manifestants à Gaza faisaient, selon le journal israélien Haaretz, plus de 60 morts et 2'400 blessés chez les Palestiniens (1). Laila Al Ghandoor, une petite fille âgée de huit mois, est morte d'avoir inhalé un gaz utilisé par les militaires israéliens. Dans sa déclaration, Jean-Yves Le Drian écrit que «la France appelle de nouveau les autorités israéliennes à faire preuve de discernement et de retenue dans l’usage de la force qui doit être strictement proportionné. Elle rappelle le devoir de protection des civils, en particulier des mineurs, et le droit des Palestiniens à manifester pacifiquement». 

Le gouvernement américain, lui, n'a fait aucun commentaire à l'exception d'un tweet du président Trump: «Un grand jour pour Israël. Félicitations !» (Big day for Israel. Congratulations!).

Devant le nombre des victimes, le Koweit a appelé le Conseil de sécurité à ordonner une enquête, mais les États-Unis ont bloqué la proposition (2).

(1) «Live Updates: Funerals for 60 Killed in Gaza Expected to Ratchet Tensions», Haaretz, 15/5/2018.
(2) Amir Tibon, «U.S. Blocks Security Council Statement Calling for Investigation Into Gaza Violence», Haaretz, 15/5/2018.

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