À propos du droit à un jugement équitable

L'interdiction de la détention arbitraire est si fondamentale qu'on la trouve déjà dans la Magna Carta anglaise de 1215 (art. 39), et il ne s'agissait là que de la codification d'une règle de common law préexistante. 

Aujourd'hui, cette règle apparaît notamment dans la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 (art. 9), la Convention européenne des droits de l'homme de 1950 (art. 5) et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966 (art. 9). Le Pacte a été ratifié par Israël en 1991.

Un État n'a le droit de s'écarter de cette règle que si «un danger public exceptionnel menace l'existence de la nation» et à condition de «signaler aussitôt aux autres États parties les dispositions auxquelles ils ont dérogé ainsi que les motifs qui ont provoqué cette dérogation» (Pacte, art. 4.3).

Le droit à être informé du motif de l'arrestation est essentiel : «Tout individu arrêté sera informé, au moment de son arrestation, des raisons de cette arrestation et recevra notification, dans le plus court délai, de toute accusation portée contre lui» (art. 9.2). 

On imagine l'iniquité d'un jugement où le tribunal dirait à un accusé qu'il est condamné à un nombre indéterminé d'années d'emprisonnement pour un crime gardé secret — un crime qu'il n'est question de faire connaître ni à l'accusé ni à ses avocats. Cela retire à la personne qui fait l'objet des poursuites toute possibilité de se défendre.

Ce genre de choses ne se produit normalement que dans les régimes de type dictatorial. Or cela se passe tous les jours en Israël et cet état de fait dure depuis plusieurs dizaines d'années (1). 

Cela concerne la plupart du temps des Palestiniens, et il s'agit de centaines de cas (2), mais même les Israéliens non juifs et les étrangers ne sont pas à l'abri. C'est ainsi que, le 25 octobre 2017, le gouvernement français a fait une déclaration : «Nous sommes préoccupés par la situation de notre compatriote Salah Hammouri, détenu par les autorités israéliennes depuis le 23 août 2017 [...]. La dernière audience en appel à l’encontre de la décision de mise en détention administrative s’est tenue le 22 octobre à la cour suprême de Jérusalem. Ni notre compatriote ni ses avocats n’ont pu avoir connaissance des charges retenues.» 

Il est intéressant de noter que les dirigeants français n'offrent à leur ressortissant qu'un soutien peu résolu : ils se limitent à dire qu'ils espèrent sa libération alors qu'on aurait pu s'attendre à ce qu'ils déclarent inadmissible cette détention arbitraire d'un Français. Cette retenue contraste avec la teneur d'une autre déclaration à propos d'une action violente palestinienne: «La France condamne l'attaque perpétrée le 26 septembre à Har Adar (Cisjordanie) qui a coûté la vie à trois Israéliens [...]. Le recours à la violence est inacceptable [...]».

(1) Voir Les détentions indéfinies sont «une abomination» et La parlementaire Khalida Jarrar reste emprisonnée sans jugement valable.
(2) «Administrative detention», www.btselem.org/topic/administrative_detention, B'Tselem, accès le 25/10/2017.

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