Le 2 décembre 2014, le parlement français a adopté par 339 voix contre 151 une résolution invitant le gouvernement à reconnaître la Palestine, imitant ainsi les parlementaires britanniques, espagnols et irlandais. C'est un geste symbolique. Le gouvernement garde les mains libres pour agir ou non.
Le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius a annoncé que la France va s'efforcer de faire adopter au Conseil de sécurité des Nations Unies une résolution demandant la reprise des négociations israélo-palestiniennes, et que, en l'absence de résultat dans les deux ans, la France reconnaîtra la Palestine (1).
Ce projet a peu de chances de réussir. D'une part, les discussions de paix n'ont jamais abouti à un accord, et on ne voit pas pourquoi cela changerait demain. Le problème est qu'elles ne restent pas enlisées à cause de l'attitude de tel ou tel dirigeant, mais en raison de la collision entre des ambitions territoriales irréconciliables (voir Retour sur un refus).
L'Express écrit: «Pour tous les observateurs, aucune solution ne viendra, à l'évidence, des parties au conflit; elle ne peut émaner que de l'extérieur sous la forme d'une pression nouvelle et soutenue» (2). Mais cette voie ne paraît pas réaliste, dans la mesure où, pour réussir, elle nécessiterait un retournement complet de la politique du Congrès et de la Maison Blanche. Or on ne voit pas qui aurait les moyens de les faire inverser leur politique, d'autant plus que leur soutien à Israël est imposé par une loi fédérale américaine, le United States-Israel Enhanced Security Cooperation Act (3).
D'autre part, si le gouvernement français décide finalement de reconnaître la Palestine, ce sera aussi un mouvement essentiellement symbolique (voir La Suède envisage de reconnaître la Palestine). Tant que le US–Israel Enhanced Security Cooperation Act restera en vigueur, que les États-Unis refuseront la reconnaissance de la Palestine et qu'ils disposeront du droit de veto aux Nations Unies pour imposer leur position, la situation restera bloquée de facto — cela quel que soit le statut de jure de la Palestine.
Au vu de cette paralysie internationale et de la poursuite de la colonisation et de l'occupation, la paix risque de rester inaccessible aussi longtemps que la population israélienne n'agira pas (voir Jana Tamimi: des vidéos à la place des roquettes). C'est irréalisable à court terme et peu probable à plus long terme, mais les autres possibilités paraissent encore plus inaccessibles.
(1) Christian Makarian, «La reconnaissance de l'État palestinien... et nos limites», L'Express, 2 décembre 2014.
(2) Ibid.
(3) Voir Pierre Jaquet, L'État palestinien face à l'impuissance internationale, L'Harmattan, 2013, pp. 59-61.